Transition énergétique : agrivoltaïsme, chance ou menace pour les grandes cultures ?
Multiplier par cinq la production d’énergie issue de panneaux photovoltaïques entre 2018 et 2028 : les ambitions gouvernementales* sont élevées. Au point que l’installation de panneaux sur les toitures ou les friches industrielles ne pourra pas suffire. L’agrivoltaïsme, c’est-à-dire l’association de panneaux photovoltaïques et de production agricole, s’annonce incontournable.
Pour le milieu agricole, reste à savoir s’il s’agit d’une opportunité ou d’une menace. Artificialisation des sols, détournement de foncier agricole et spéculation sont quelques-unes des craintes formulées à l’encontre de l’agrivoltaïsme. Sans oublier la substitution de la production d’énergie à la production alimentaire. Le spectre de la méthanisation en Allemagne plane : loin d’avoir consolidé les exploitations comme atelier de diversification, elle a quasiment fait disparaître l’élevage de certains territoires, a rapporté Jérôme Pavie de l’Institut de l’Elevage.
Des règles pour protéger l’agriculture
Quelques textes réglementaires visent à éviter ces écueils : les infrastructures doivent être réversibles (pour lutter contre l’artificialisation des sols), la production agricole doit être maintenue et les installations ne peuvent se faire qu’à l’issue d’une étude préalable.
À noter que les installations, qui sont récentes, ont une durée de vie de 30 ans. Aucune centrale au sol n’a donc encore été démantelée.
La technologie s’adapte aussi aux grandes cultures
À l’origine, les premières centrales photovoltaïques au sol contenaient beaucoup de panneaux, fixés proche du sol. Seule la production ovine était possible en-dessous. Depuis, la surface couverte par les panneaux a diminué et ces derniers se sont élevés, permettant le passage d’engins agricoles en-dessous.
L’agrivoltaïsme s’est jusqu’à présent relativement peu développé sur grandes cultures. Les technologies ont déjà beaucoup progressé en quelques années grâce aux autres productions. Il existe maintenant des panneaux qui pivotent pour capter le maximum de luminosité et limiter l’impact sur les cultures, et des centrales avec des panneaux quasiment verticaux. Les technologies continuent d’évoluer et sont désormais compatibles avec la production de grandes cultures.
Attention à l’intégration paysagère
Sylvain Bernard et Xavier Canal, respectivement agriculteur et responsable d’exploitation de lycée agricole, ont mis en avant l’importance de l’intégration paysagère des centrales. En l’occurrence, leurs centrales sont des « serres » de maraîchage. L’intégration paysagère paraît être le point-clef de l’acceptation du projet par les riverains.
Pour le maraîchage, la relation gagnant-gagnant entre l’activité agricole et la production d’électricité photovoltaïque est possible. De par leur spécificité, les enseignements de ces deux intervenants du Sud sur les gains apportés par les panneaux ne sont pas transférables aux grandes cultures ni à tous les territoires. D’autant plus que les deux projets concernaient des bâtiments financés et exploités par une autre société, non pas des panneaux pour lesquels l’exploitation investi et récupère le revenu.
En matière de conclusion générale, tous les intervenants se sont accordés sur le fait que de grandes installations, générant d’importants flux financiers, menacent davantage l’usage agricole des terres que de petites installations.
* La Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE) prévoit entre 35,6 et 44,5 GWc installés en photovoltaïque en 2028 (et 20,6 en 2023), contre 8,3 GWc installés en 2018.
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