Les projets de production d’énergie à la ferme sont des « PUMA » : des « projets utiles mais ailleurs ». Si l’opinion n’y est pas foncièrement hostile, elle n’accepte pour autant pas qu’ils s’implantent dans son environnement proche. À la liste des défis que l’agriculture doit relever, s’ajoute donc celui de l’acceptabilité des projets énergétiques auprès du grand public.
« Deux grands sujets de société s’entremêlent »
Pour Natalie Rastouin, fondatrice de l’agence de conseil en stratégie de communication Polytane et Membre du comité directeur de l’institut Montaigne, ces réticences ne s’expliquent pas uniquement par les nuisances sonores, odorantes ou encore visuelles, potentielles ou réelles. « En réalité, deux grands sujets de société s’entremêlent : le rapport des Français à l’énergie, et la perception qu’ils ont des agriculteurs », introduit l’experte.
Un imaginaire collectif à façonner
Le pétrole, comme le nucléaire font indéniablement partie de la culture énergétique des Français. « 68 % des riverains d’une centrale nucléaire se sentent en sécurité », cite pour exemple Natalie Rastouin. Si tout le monde est « pour » les énergies renouvelables, elles restent encore relativement méconnues, et peinent à s’imposer dans l’imaginaire collectif. La pédagogie a donc encore de beaux jours devant elle.
En parallèle, les agriculteurs bénéficient d’un très bon capital sympathie auprès des citoyens : 92 % en ont une bonne image, selon un sondage Elabe mené en janvier 2024. « Un projet d’énergie, ça sort de l’image traditionnelle qu’on a des agriculteurs. La méconnaissance, à la fois du métier d’agriculteur et des technologies de production d’énergie, est à l’origine de beaucoup de fantasmes », pointe l’experte.
Des réactions « dans l’émotion »
Enfin, les projets énergétiques nécessitant des terres, ils créent une pression sur le foncier et peuvent générer des conflits d’usage. « L’installation de néo-ruraux dans les campagnes crée une opposition entre cadre de vie et cadre de production », souligne Natalie Rastouin. Un « choc des imaginaires » qui a pour principale conséquence des réactions « dans l’émotion », et non rationnelles. « Cette perception différente de l’espace dans lequel on vit en commun, il faut en tenir compte quand on veut instaurer le dialogue avec les riverains », insiste la spécialiste.
Quels atouts faut-il donc mettre en avant pour créer du lien avec le voisinage ? « Mettez en avant les co-bénéfices », conseille Natalie Rastouin. Ceux-ci sont parfois économiques (chauffer un bâtiment public), mais ce sont plus souvent les co-bénéfices environnementaux (énergie décarbonée, traitement des déchets, etc.) qui font mouche. « Trouvez des alliés : élus locaux, associations environnementales ou de consommateurs, etc., et demandez-leur de se mouiller », ajoute l’experte. Quant à la communication autour de son projet, « des gens peuvent le faire pour vous », glisse t-elle. Il faut compter maximum 10 000 euros pour bénéficier de l’accompagnement d’un cabinet spécialisé. Une somme importante, mais raisonnable au regard des millions d’euros investis dans ces projets.
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