Quelles stratégies pour réussir le maïs grain ?
Perspectives Agricoles : D’où proviennent les bons résultats de 2021 ?
Thomas Joly : Après deux étés particulièrement chauds et secs, 2021 restera dans les mémoires comme une année sans stress majeur. L’été a été marqué par une pluviométrie régulière de juin à août dans la plupart des bassins de production de maïs. Ces pluies ont alimenté les plantes dans leurs phases les plus sensibles. En l’absence de stress hydrique important, l’élaboration du nombre de grains/m² est essentiellement limitée par la structure du peuplement : les plantes sont restées fonctionnelles et vertes longtemps. Les températures clémentes et la pluviométrie estivale ont assuré une migration lente et régulière des assimilats. Les poids de mille grains sont ainsi globalement satisfaisants sans toutefois être exceptionnels compte tenu d’un nombre de grains médian élevé. Le maïs grain atteint en 2021 un record de rendement estimé à 110 q/ha, provenant tout autant de l’absence de mauvaises parcelles que des situations « élites ». Les rendements des maïs pluviaux sont en effet exceptionnels. Les très bons résultats du maïs fourrage ont entraîné une réaffectation de parcelles en faveur du grain. Le niveau de transfert pourrait dépasser cette année 100 000 ha, soit plus d’un million de tonnes de production supplémentaire de maïs grain.
P. A. : La récolte tardive a-t-elle eu des conséquences ?
T. J. : Les faibles températures ont entrainé un allongement du cycle de la culture. La dessiccation des grains a ainsi été retardée. Du fait de volumes importants et d’une humidité des grains élevée, nous pouvions craindre des engorgements aux séchoirs au moment de la récolte. Des pluies auraient également pu stopper les chantiers comme en 2019, mais la météo a été clémente dans son ensemble. Il y a bien eu une tendance à patienter pour récolter plus sec et limiter les frais de séchage. Cependant, du fait des prix de vente soutenus, certaines récoltes ont été anticipées pour étaler les travaux et assurer la mise à l’abri du maïs afin de préserver sa qualité sanitaire.
P. A. : Dans le contexte actuel, faut-il faire évoluer les critères de choix des variétés ?
T. J. : Les stratégies de conduite de culture, et le choix des variétés qui en découlent, sont liées au contexte pédoclimatique, mais aussi aux attentes de chaque producteur. La durée du cycle correspond à la durée d’élaboration du rendement, entre le semis et la maturité physiologique, pour atteindre 30 à 32 % d’humidité du grain. Une variété tardive à cycle plus long aura donc tendance à produire plus en situation peu limitante en température et en eau. En revanche, cet avantage ne s’extériorisera pas systématiquement en situation limitante. Compte-tenu des évolutions récentes du climat, il convient de répartir les risques, par exemple en étoffant le choix variétal pour étaler les dates de floraison. Face aux risques de stress hydrique et thermique, trois grandes stratégies, combinables entre elles, peuvent être mises en œuvre dans les choix variétaux. « L’esquive » cherche à éviter le stress quand la plante y est la plus sensible. Pour cela, il faut semer tôt et/ou choisir une variété précoce pour ne pas exposer la plante aux conditions sèches de l’été pendant la floraison. La stratégie de « l’évitement », quand cela est possible bien sûr, vise à augmenter les ressources, par exemple grâce à l’irrigation en accompagnant la plante pendant les phases de sensibilité au stress hydrique. Enfin, « la tolérance » consiste à sélectionner la plante par rapport à sa capacité à encaisser les stress. Les améliorations variétales de ces dernières années vont notamment dans ce sens.
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