Coup de projecteur sur Cuba : une destination importante pour le blé français
Composante majeure des Caraïbes, l’ile de Cuba consomme depuis des décennies du blé tendre. Jusqu’au XIXe siècle, Cuba était producteur de blé, comme l’attestent les premières traces de cette culture datées de la fin du XVe siècle à Santiago de Cuba, lors du second voyage de Christophe Colomb. Puis des mesures politiques couplées à des problèmes sanitaires des grains ont causé l’arrêt de la production de cette céréale.
Au XXe siècle, des tentatives ont été faites pour relancer la production locale de blé tendre, mais l’engouement des agriculteurs cubains s’est tourné vers la production de canne à sucre et de légumes. Aujourd’hui, bien que des essais pour réimplanter la culture soient conduits avec succès, le manque de moyens financiers et de volonté politique écarte toute possibilité de relancer cette production.
Ainsi, Cuba importe la totalité de sa consommation de blé tendre via un acheteur public, l’Empresa Comercializadora de Alimentos. Ce dernier monopolise les importations de blé par des appels d'offre. Le blé est ensuite déchargé dans les principaux ports du pays : Cienfuegos et La Havane.
Une capacité d’écrasement limitée
Après la révolution cubaine de 1959, deux moulins étaient présents dans le pays, limitant la production de farine à moins de 200 000 t. Au début des années quatre-vingt, la production de farine connaît une dynamique particulière grâce aux nouvelles installations venues d’Italie.
Malheureusement, la chute de l’ex-Union soviétique et le blocus financier imposé par les États-Unis au régime de Fidel Castro ont plongé la petite île dans une crise économique sans précédent. C’est seulement à l’orée des années 2000 que Cuba a vu un redressement de sa production de farine. Les moulins ont atteint finalement, en 2011, une capacité d’écrasement annuelle de 550 000 t.
Malgré tout, les installations arrivent à bout de souffle et, faute de ressources financières, les moulins ne travaillent pas à plein régime, ce qui conduit Cuba à importer non seulement du grain mais aussi de la farine. Les quantités sont compliquées à évaluer à partir des statistiques quasi-inexistantes du pays.
La France, premier fournisseur de blé à Cuba
Pour satisfaire ses utilisations assez diversifiées, Cuba importe entre 600 et 800 000 t de blé chaque année. Le pays recherche du blé de dureté soft, medium hard et hard. Cette dureté reflète l’état de la texture du grain et de la cohésion des particules dans l’albumen, et détermine notamment l’énergie qui sera nécessaire pour moudre le grain. La plupart des blés français sont classés medium hard.
Les principaux fournisseurs de Cuba sont la France, qui détient la moitié des parts de marché, le Canada, l’Allemagne et la Pologne (figure 1). La France, qui est de loin son premier fournisseur, exporte en moyenne 350 000 t de blé vers Cuba chaque année.
Sur la campagne 2021-22 en cours, l’Allemagne avait exporté fin octobre près de 50 000 t de blé tendre vers Cuba alors que, fin décembre, les opérateurs français en avaient déjà exporté plus du triple (335 000 t). En août 2021, Cuba a également importé 20 000t de blé tendre en provenance d’Argentine.
Les prévisions d’importations totales par le pays sont estimées à un peu plus de 600 000 t pour cette campagne. Le Canada n’a pas encore contractualisé de blé vers cette destination, faute de volume disponible.
La relation privilégiée avec la France sur le blé, produit prioritaire pour les autorités cubaines, est le fruit de l’utilisation d’une ligne de crédit à court terme qui bénéficie d’une garantie publique de l’État français.
Cependant, depuis ces dernières années, Cuba traverse une crise de liquidité, accentuée en 2020 par la pandémie (absence de tourisme permettant les recettes en devises). Ainsi, l’évolution du commerce bilatéral entre la France et Cuba dépendra essentiellement de la capacité de l’île à capter des devises et à dynamiser de nouveau les achats extérieurs.
Deux marchés du pain mais un seul acheteur de grainÀ Cuba, deux types de boulangeries coexistent. Les boulangeries étatiques fabriquent un pain normado, d’un poids fixé à 80 grammes ; il est inclus dans la carte de rationnement de la population cubaine (photo ci-dessus). On trouve aussi des boulangeries privées, qui se développent depuis 2008 dans le cadre de la modernisation de l’économie. Ces dernières ont la liberté de produire le pain qu’elles souhaitent et d’en fixer librement le prix. Malgré tout, elles restent dépendantes de l’État pour l’approvisionnement de la matière première. Elles ne peuvent donc, en aucun cas, faire leur propre mélange pour corriger la farine achetée.
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