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Maladies du blé tendre : une résistance variétale à exploiter pleinement
Même si elles ne sont pas toujours totales, les résistances génétiques peuvent constituer des protections très efficaces contre la plupart des maladies présentes en France. Malheureusement, à ce jour, aucune variété de blé tendre ne cumule un niveau suffisant de résistance à l’ensemble des maladies pour qu’il soit possible de limiter l’inoculum et de se passer de toute protection fongicide chimique sans risquer des pertes de rendement.
Pour tirer le meilleur des résistances variétales, une variété sera choisie en fonction des principaux risques parasitaires de la parcelle dans laquelle elle est cultivée. Les variétés résistantes seront valorisées par des économies de traitement fongicide, entraînant une réduction de l’indice de fréquence de traitements (IFT) de la culture.
Elles apporteront également un peu plus de sécurité et de flexibilité dans la conduite de la culture.
Cependant, sous la pression de sélection exercée par les variétés cultivées, les races de pathogènes évoluent dans le temps. Ces modifications obligent à actualiser régulièrement les notes de résistances des variétés et à rester vigilant.
Les pertes de rendement en l’absence de traitement fongicide (écart de rendement entre modalités « traité » et « non traité ») sont un bon indicateur du niveau de résistance globale des variétés aux maladies dominantes de la zone considérée.
Inutile de traiter contre le piétin-verse avec une variété résistante
L’estimation du risque de piétin-verse est largement déterminée par le potentiel infectieux, le milieu physique et la date de semis de la parcelle. Dans les situations de semis précoces et de précédent blé sur limons battants, le choix variétal est le meilleur moyen de lutte - aussi efficace, sinon plus, qu’une intervention phytosanitaire. Avec les variétés les plus résistantes au piétin-verse (note de résistance supérieure ou égale à 5), telles Advisor, Syllon ou LG Absalon, traiter n’apporte aucun gain économique, même en présence de la maladie.
Une nuisibilité due surtout à la septoriose et aux rouilles
Dans la moitié nord de la France (figure 1), bien que la rouille brune ait été bien présente en 2017 et 2018, la septoriose et la rouille jaune restent les plus fréquentes et, en règle générale, les plus nuisibles. La nuisibilité moyenne mesurée sur les essais variétés dans cette zone a été d’environ 17 q/ha en 2018 et de 16 q/ha sur 2016-2018.
Ces chiffres masquent de fortes disparités régionales avec, par exemple, en moyenne sur 3 ans, 24 q/ ha de nuisibilité en Bretagne-Basse Normandie contre 7 q/ha en Barrois-Lorraine. Avec de bons niveaux de résistance à la rouille jaune et à la septoriose, LG Absalon, Fructidor et RGT Cesario restent des références avec les niveaux de nuisibilités parmi les plus faibles. Parmi les plus cultivées depuis 2013, Rubisko et Cellule affichent aujourd’hui en revanche des nuisibilités assez élevées, conséquence de l’érosion de leur niveau de résistance à la septoriose.
Dans la zone sud (figure 2), la septoriose et la rouille brune restent les maladies les plus fréquentes et, en règle générale, les plus nuisibles. Toutefois, la rouille jaune est plus régulièrement observée depuis 2012, notamment sur les variétés les plus sensibles. La nuisibilité globale (toutes maladies confondues) a été plus élevée que dans le nord de la France, avec une moyenne pluriannuelle (2016-2018) de 18 q/ha et une moyenne pour 2018 de 23 q/ha.
Adaptez la dépense « fongicides » à la sensibilité variétale
En plus du prix du blé et du niveau de pression de maladie observé au printemps, la variété doit également être prise en compte pour choisir un programme de protection. Le niveau de résistance peut faire varier la nuisibilité du simple au double (hors rouille jaune). De ce fait, une variété sensible, c’est-à-dire présentant un écart de rendement « traité - non traité » élevé, nécessitera un niveau de protection élevé (tableau 1).
Par expérience, une variété résistante présentant un écart « traité-non traité » d’environ 10 q/ ha peut justifier, selon les années, qu’on dépense en moyenne 45 €/ha, avec une hypothèse de prix du blé à 16 €/q. (La dépense fongicide optimale théorique s’échelonne de 30 à 53 €/ha selon le prix du blé retenu.) En revanche, pour une variété deux fois plus sensible, la moyenne des dégâts observés est de 20 q/ ha, et la dépense optimale théorique s’échelonne alors de 53 à 82 €/ha. Au final, choisir une variété résistante permet d’économiser environ 30 €/ha par rapport à une variété sensible.
Attention, ces repères ne valent que pour les pertes occasionnées globalement par les maladies foliaires, autrement dit par la septoriose et les rouilles, qui représentent les principaux risques. Si d’autres risques, comme une attaque de rouille jaune très précoce, le piétin-verse (encadré), l’oïdium ou la fusariose, venaient s’ajouter, la protection devra être adaptée en conséquence. Enfin si ces repères sont utiles pour préparer sa stratégie de protection contre les maladies, il faudra au final prendre en compte le contexte de la saison et les conditions réelles de développement des maladies pour ajuster en cours de campagne à la hausse ou à la baisse les programmes bâtis en morte saison.
Les races de rouilles et de septoriose évoluent
La résistance variétale reste le moyen de lutte le plus économique et le plus efficace pour lutter contre la rouille jaune du blé tendre. Plus de la moitié des variétés actuelles restent résistantes ou assez résistantes à cette maladie. Toutefois les races de rouille jaune évoluent en fonction du paysage des variétés cultivées, c’est pourquoi des contournements de résistance variétale surviennent régulièrement. Après le contournement de la résistance d’Oregrain en 2015-2016, la résistance de Némo a été à son tour contournée en 2017-2018. Une gestion efficace de la lutte génétique suppose donc un suivi des populations de rouille jaune et de l’évolution de leurs profils de virulence (encadré). Si les résistances variétales qui s’expriment dès le stade plantule sont efficaces tout au long du cycle de la culture, d’autres résistances ne se mettent en place qu’une fois un certain stade de développement atteint. Ainsi, beaucoup de variétés de blé tendre résistantes en fin de montaison et durant le remplissage, telles Rubisko ou Cellule, peuvent être sensibles durant le tallage ou le début de la montaison.
« La résistance variétale reste le moyen le plus économique et le plus efficace pour lutter contre la rouille jaune du blé tendre. »
Les races de rouille brune évoluent aussi régulièrement en réponse aux changements du paysage variétal, comme le montrent les résultats 2017 de l’enquête réalisée par l’Inra. Suite à la disparition des variétés qui l’ont fortement favorisée (Bermude, Sankara, Caphorn et Aubusson), la race dominante depuis dix ans a été remplacée par une nouvelle famille qui présente une forte affinité avec la variété Cellule. Parallèlement, les races virulentes sur le gène de résistance Lr28 maintiennent leur progression en 2017 : elles représentaient 16 % de la population de rouille brune en 2016, et 41 % en 2017 ; aussi les variétés dont la résistance repose essentiellement sur Lr28, comme Oregrain, Némo ou Filon, sont de plus en plus régulièrement très touchées par la rouille brune. En revanche Rubisko conserve un assez bon niveau de résistance.
Concernant la septoriose, depuis quelques années, quelques variétés comme Fructidor ou LG Absalon se démarquent par leur très bon niveau de résistance à la maladie. Cependant, même si les contournements de résistance à la septoriose sont en règle générale plus progressifs que pour les rouilles, on observe fréquemment une érosion du niveau de résistance des variétés les plus cultivées, comme Rubisko ou Cellule. Déjà pressenti en 2017 et confirmé en 2018, Mutic, Filon, Unik et RGT Goldeno, bien que récemment inscrites, ont montré une détérioration rapide de leur niveau de résistance à la septoriose.
En savoir plusPlus d’informations sur la nuisibilité des maladies du blé tendre, selon la variété considérée ainsi que la région et le profil de sensibilité, sont consultables sur http://arvalis.info/1cc.
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