Gestion des adventices à l’interculture : le faux-semis au banc d’essai

Pendant l’interculture, divers leviers peuvent être mobilisés pour gérer les adventices. Les résultats de douze essais d’Arvalis et de Terres Inovia ont été compilés pour essayer d’identifier les stratégies de travail du sol les plus efficaces pour maîtriser les adventices.
Les faux-semis à l'automne constituent un levier de désherbage les plus efficaces

L’interculture est une période propice à la mise en œuvre de leviers d’action sur le stock semencier, tels que le labour ou la réalisation de faux-semis. Cependant, le développement des couverts d’interculture, que ce soit pour des raisons agronomiques ou réglementaires, peut complexifier la mise en œuvre de ces leviers, et tout particulièrement du faux-semis. La présence du couvert peut aussi avoir un impact direct sur la flore adventice. Des références étaient nécessaires pour mieux identifier quelle stratégie adopter à l’interculture pour une bonne gestion des adventices : faut-il privilégier le travail mécanique ou la couverture des sols ?

Dans ce contexte, plusieurs essais ont été mis en place par Arvalis et Terres Inovia, en 2007 et 2008 puis en 2015 et 2016 dans le cadre du projet COSAC(1) (Gestion des adventices dans un contexte de changement) pour évaluer plusieurs de ces stratégies et leviers de gestion des adventices. Les essais ont concerné plusieurs intercultures différentes : blé – blé (cinq essais), colza – blé (quatre essais), féverole – blé (un essai), blé – orge de printemps (un essai) et blé – tournesol (un essai). La flore présente est principalement constituée de graminées (ray-grass ou vulpin) dans dix essais sur douze, et de géranium dans un essai.

Ces essais comparent plusieurs stratégies de gestion de l’interculture qui se distinguent par l’introduction ou non d’un couvert, par le recours ou non aux déchaumages et par la réalisation ou non d’un faux-semis ; plusieurs dates de réalisation ont été comparées. La densité d’adventices par espèce a été observée à l’interculture à plusieurs reprises, puis dans la culture suivante (avant le désherbage de postlevée), grâce à des comptages au cadre.

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Le faux-semis favorise les levées de graminées en interculture

À l’interculture, les résultats sont variables selon les essais, les espèces adventices présentes et les conditions météo. D’une façon générale, les opérations de déchaumage ou de pseudo labour n’ont pas beaucoup d’impact sur les levées d’adventices.

Concernant le faux-semis, les résultats sont directement liés à la flore présente. Ainsi l’absence de tout travail du sol à cette période maximise les levées de colza et de géranium. Un faux-semis avant une pluie fait tout de même lever beaucoup de géraniums mais il réduit fortement les levées de repousses de colza (figure 1). À l’inverse, les levées de vulpin et ray-grass sont plus nombreuses après un travail du sol très superficiel positionné peu de temps avant des pluies et après la mi-août (figure 2), comme l’indiquent les résultats statistiquement significatifs de sept essais sur dix. L’absence d’effet significatif dans trois autres essais est imputable à une infestation insuffisante, à une méthodologie inadaptée ou à des conditions météorologiques défavorables aux levées. De fait, l’efficacité du faux-semis dépend énormément de l’état d’imbibition des semences.

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Pas d’effet de la conduite de l’interculture sur la céréale suivante

Dans la grande majorité des essais, qui, toutefois, portent seulement sur un an, les modalités de gestion de l’interculture n’ont pas d’effet significatif sur la densité d’adventices (principalement des vulpins et ray-grass) observées dans la culture suivante - souvent une céréale.

Un seul essai (Terres Inovia, dans le Tarn-et-Garonne) montre une densité d’adventices en culture significativement plus faible dans la modalité avec un faux-semis efficace par rapport à l’absence de faux-semis. On s’attendrait alors à ce que, plus il y a eu de levées d’adventices pendant l’interculture, moins il y en ait dans la culture suivante. Or ce n’est pas le cas : la modalité sans faux-semis a déstocké autant que la modalité avec un faux-semis efficace. De fait, on ne voit pas dans cet essai, pas plus que dans les autres essais, de corrélation entre la densité d’adventices en culture et les quantités d’adventices levées à l’interculture (figure 3).

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Plusieurs hypothèses peuvent expliquer l’absence de relation entre levées en interculture et dans la culture suivante. Le comptage des levées en interculture pourrait considérablement sous-estimer l’efficacité du faux-semis puisqu’il manque les semences germées qui meurent avant de lever ou avant le comptage. En effet, les germinations non viables sont fréquentes en été où des périodes humides et sèches s’alternent.

Le déstockage de semences réalisé pendant l’interculture (par mise en germination puis destruction) ne concernerait qu’une toute petite proportion du stock semencier total. Les levées d’adventices lors du faux-semis sont de l’ordre de 24 à 1600 plantes/m², alors qu’à titre d’exemple, le nombre de graines tombées au sol le jour de la moisson a été estimé à 23 000 graines/m² dans un essai sur la récolte des menues pailles pour une infestation initiale moyenne de 27 plantes/m². Il n’est donc pas surprenant de ne pas voir d’effet après un seul faux-semis une seule année.

Le faux-semis d’automne et les observations n’ont pas été poursuivis les années suivantes, or des effets après plusieurs années de réalisation de faux-semis ont été observés dans d’autres études. De plus, l’effet de plusieurs faux-semis lors d’un même automne n’a pas été étudié ici. Par ailleurs, certaines espèces adventices qui lèvent en culture ne sont pas impactées par le faux-semis à l’interculture car celui-ci est réalisé en dehors de leur période préférentielle de levée.

Le faux-semis permet de faire lever et de détruire certaines graines, mais peut aussi influer sur la dormance, avec des conséquences difficilement prévisibles sur la levée dans la culture suivante ou encore sur l’augmentation de la persistance des semences, etc.

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Un effet des couverts peu évalué

La présence de couvert (culture intermédiaire semée ou repousses de colza) à l’interculture n’a pas eu de conséquences sur l’enherbement dans la culture suivante. Il faut toutefois noter que, dans ces essais, la levée et le développement des couverts ont généralement été décevants, la levée du couvert étant très dépendante des pluies d’été en interculture courte. Par ailleurs, si l’objectif est de faire lever un maximum d’adventices en interculture pour réduire le stock semencier, un couvert d’interculture est moins adapté qu’un travail très superficiel (figure 2).

Ces essais n’ont pas mis en évidence une stratégie unique à adopter à l’interculture, du fait de la diversité des contextes pédoclimatiques et floristiques. Toutefois, l’arrivée d’une pluie après un travail superficiel favorise grandement les levées d’adventices à l’interculture.

Des analyses complémentaires sont nécessaires pour tenter d’identifier les facteurs qui conditionnent le niveau de réussite de chaque technique selon l’espèce adventice ciblée : pluviométrie, nombre de faux-semis, délai entre la récolte précédente et le premier travail du sol, délai entre le dernier travail du sol et l’implantation de la culture… Il faudrait aussi évaluer l’efficacité de plusieurs faux-semis par interculture, répétés plusieurs années.

Néanmoins, au vu de la variabilité des résultats, il ne faut pas attendre de résultats immédiats d’un seul faux-semis à l’automne. Afin d’obtenir une bonne gestion des graminées avant culture d’automne, il est sans doute plus sûr et rapide de miser sur le choix de la rotation et le raisonnement du travail du sol.

(1) Projet ANR-15-CE18-000.

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