Qualité de l’eau : quelle est l’efficacité des bandes enherbées ?

Différents leviers sont actionnables pour préserver la qualité de l’eau, et les bandes enherbées ont fait leurs preuves depuis longtemps. Alors que l’on observe de plus en plus de contraintes environnementales liées aux demandes de la société, retour sur les expérimentations menées dans les années 90, qui font toujours référence aujourd’hui.

Les transferts de produits phytosanitaires par ruissellement constituent une des voies de contamination des eaux superficielles. Quand les produits sont en communication directe avec les eaux souterraines, (bétoires, dolines, gouffres), ils peuvent également contaminer ces dernières.

La réduction des risques de contamination des eaux de surface passe d’abord par le choix pertinent des produits à appliquer et de l’époque de traitement. La mise en pratique de techniques culturales et d’aménagement des parcelles susceptibles de réduire les transferts par ruissellement peuvent également contribuer à améliorer la qualité des eaux.

C’est pourquoi, ARVALIS (à l’époque ITCF), avec le soutien de l’Agence de l’Eau Loire-Bretagne a entrepris une étude sur trois sites expérimentaux de l’ouest de la France pour mesurer l’efficacité des dispositifs enherbés, implantés en aval des parcelles, sur les transferts de produits phytosanitaires par ruissellement. Cette étude, qui a eu lieu sur trois campagnes de 1993 à 1996, conclut que 6 mètres de bande enherbée suffisent à retenir 70 % des quantités de produits phytosanitaires reçus par ruissellement.

Des parcelles expérimentales de 250 m2 hydrauliquement isolées

Les dispositifs expérimentaux ont été implantés dans trois milieux pédoclimatiques différents, à La Jaillière (44), Plélo (22) et Bignan (56). Ils sont constitués de parcelles de 250 m² (50 * 5 m), hydrauliquement isolées, en aval desquelles se trouve une bande enherbée de 18 m.

Un système de collecte du ruissellement (tôle galvanisée) situé respectivement à 0, 6, 12 et 18 m en aval des parcelles simule différentes largeurs de bandes enherbées ainsi qu’un témoin sans bande enherbée. Les bandes enherbées, de 6, 12 et 18 m de longueur représentent 12, 24 et 36 % de la surface des parcelles cultivées en amont.

Les essais ont permis de collecter des épisodes de ruissellement sur différentes cultures : maïs, blé et pois. Lors de chaque épisode, le volume de ruissellement collecté en aval de chaque parcelle élémentaire a été mesuré, tout comme les concentrations en produits phytosanitaires, en nitrate et en phosphore soluble.

L’efficacité des bandes enherbés est satisfaisante dès 6 m de large

L’efficacité des bandes enherbées sur le transfert par ruissellement varie selon l’importance de l’épisode de ruissellement. Les données d’efficacité sont donc fournies sous deux angles : l’efficacité moyenne est la moyenne des efficacités de chaque évènement de ruissellement. Chaque évènement a donc la même importance, qu’il s’agisse de 20 l ou 200 l.

En prenant la totalité des mesures d’une campagne sur une modalité, on peut calculer l’efficacité totale sur l’ensemble des épisodes.

Figure 1 : Mesures d’efficacités des bandes enherbées (en % de réduction par rapport au témoin) : efficacité moyenne pour les concentrations de produits phytosanitaires, efficacité totale pour les flux de MES, nitrate et phosphore

Ainsi, les bandes enherbées de 6 m de large ont capté 62 % de l’ensemble des volumes (en litres) de ruissellement qu’elles ont reçu, contre 70 et 88 % respectivement pour les bandes de 12 et 18 m (efficacité totale). La moyenne des efficacités mesurées sur les volumes de ruissellement avec les bandes de 6 m a été de 71 %. Celle des bandes de 12 et 18 m respectivement de 85 et 80 %.

Les bandes enherbées filtrent le ruissellement qu’elles reçoivent et retiennent les matières en suspension (MES) (flux de MES mesuré en mg). 90 % des MES (efficacité totale) ont été retenues avec 6 m de bande enherbée, 84 % avec 12 m de bande et 99 % avec 18 m de bande. La moyenne des efficacités enregistrées au cours des expérimentations a été respectivement de 87, 77 et 99 % des MES pour les bandes de 6, 12 et 18 m de large.

Vis-à-vis des produits phytosanitaires, les bandes enherbées réduisent leurs concentrations (en µg/l). Cette capacité épuratrice des bandes de 6 m de large atteint une moyenne interannuelle de 71 %, contre 84 et 91 % pour les bandes de 12 et 18 m (efficacité moyenne).

D’autres bénéfices pour la qualité de l’eau

Bien que les efficacités sur transferts de nitrate et de phosphore soluble soient plus hétérogènes que celles enregistrées sur le transfert des produits phytosanitaires, les bandes enherbées constituent des filtres intéressants. Les bandes de 6 m ont permis de capter plus de 65 % (efficacité totale) des transferts de nitrate et 50 % des flux de phosphore soluble. L’efficacité sur les flux (en mg) de ces deux minéraux a été respectivement de 90 et 80 % avec 12 m de bande enherbée et de 90 et 63 % avec 18 m de bande enherbée.

Comment expliquer ces résultats ?

La rugosité homogène de la surface de la bande enherbée ralentit la vitesse du ruissellement et permet son infiltration. Le sol, sous la végétation herbacée, constitue un milieu homogène sans macroporosité et permet une infiltration lente des volumes interceptés.

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