Campagne 2021 : un climat à géométrie variable

Après plusieurs campagnes marquées par des déficits pluviométriques, 2021 a quelques peu bousculé la donne avec des gelées tardives, des températures estivales précoces et un excès d’eau hivernal et estival.
Bilan du climat durant la campagne 2020-2021

Avec des températures maximales supérieures à 30°C en moyenne sur le pays du 14 au 18 septembre, le début de la campagne 2020-21 a été particulièrement chaud. Des températures clémentes se sont ensuite installées du 21 octobre au 19 novembre.

Météo France a estimé que la vague de chaleur de septembre aurait été très peu probable dans un climat non modifié par l’homme, avec une durée de retour de l’ordre de 150 ans. Le changement climatique a rendu cet événement environ douze fois plus probable. De plus, l’épisode aurait également été moins chaud s’il s’était produit dans un climat non modifié par les rejets de gaz à effet de serre.

Les passages pluvieux ont été rares en septembre et novembre, hormis quelques épisodes méditerranéens. À l’opposé, octobre a été plus agité, avec un épisode méditerranéen historique sur les Alpes-Maritimes le 2, générant des cumuls de précipitations exceptionnels et des inondations catastrophiques. La station de Saint-Martin Vésubie a ainsi enregistré en 24 heures un cumul de 500,2 mm de pluies, ce qui constitue un record absolu à la fois pour la station et pour l'ensemble du département des Alpes-Maritimes.

Un début d'hiver très pluvieux

Le nombre de jours de gel a dépassé les valeurs saisonnières de 2 à 13 jours sur la majeure partie du pays.

Les températures, qui ont alterné tout au long de l'hiver entre douceur et nets refroidissements, ont néanmoins été globalement supérieures aux normales de presque 1°C à l’échelle du pays. Toutes les régions ont profité de cette douceur, en particulier les régions de la Nouvelle Aquitaine aux frontières belges et allemandes. Février a été tout en contrastes, avec un épisode de froid marqué sur une grande moitié nord du pays du 7 au 14 février suivi par des records de douceur en fin de mois.

Les passages perturbés ont été plus fréquents qu'à l'ordinaire sur la quasi-totalité du pays. Le nombre de jours de pluie a été généralement supérieur à la normale de 5 à 15 jours, et localement plus sur les côtes bretonnes et en Aquitaine. Les cumuls de précipitations ont été excédentaires de plus de 20 % sur une grande partie du territoire et, localement, de plus de 50 % sur la moitié nord et le flanc est du pays. En revanche, les précipitations ont été déficitaires autour de la Méditerranée.

La période de décembre à fin janvier a été particulièrement pluvieuse, provoquant des crues et des inondations sur le sud-ouest et le nord de la France. La Charente-Maritime, les Landes et le Lot-et-Garonne ont été touchés par des crues exceptionnelles. Pour le sud des Landes et la côte basque, c’est un hiver historique en termes de précipitations. À l’opposé, le Languedoc Roussillon a connu un hiver déficitaire. En moyenne sur la France, la pluviométrie a été excédentaire de plus de 30 %.

Un printemps marqué par des gelées tardives

PRINTEMPS 2021 : des gelées prononcées en avril

Au printemps 2021, les températures ont été globalement assez fraîches, malgré quelques périodes de douceur plus fréquentes en mars ; un pic de chaleur est notamment survenu du 29 mars au 1er avril, durant lequel les températures maximales ont battu des records.

Les nuits ont été souvent froides, particulièrement au mois d'avril où de fréquentes et sévères gelées nocturnes ont impacté certaines productions agricoles (figure 1). À l’échelle du pays, les températures apparaissent déficitaires de plus de 1°C - un déficit plus marqué sur le Grand-Est.

Après un début de printemps assez sec, les précipitations ont été fréquentes et abondantes sur la majeure partie du pays durant le mois de mai. Cependant, à l’échelle de la saison, les cumuls de précipitations ont été généralement déficitaires sur la moitié ouest : de 20 % des côtes de la Manche à l'Atlantique et à plus de 50 % des Pyrénées au Roussillon ; à l’opposé, les pluies sont plus conformes aux valeurs saisonnières sur la moitié est. En moyenne sur la France, la pluviométrie a été déficitaire de plus de 15 %.

Des pluies récurrentes tout l’été

Le début de l’été avait pourtant commencé sous la chaleur, avec un mois de juin en moyenne un degré plus chaud que les valeurs de saison et dont les températures maximales ont fréquemment dépassé les 30°C sur la majeure partie du pays. Mais cette période de chaleur s’est vite estompée : en juillet et août, les températures ont été fraiches pour la saison avec un déficit thermique de presque 1°C, sauf autour de la Méditerranée. Néanmoins, sur l’ensemble de l’été, les températures ont été proches des valeurs saisonnières.

Le fait marquant de l’été reste les cumuls de précipitations. À partir de la mi-juin, une succession de « gouttes froides » (encadré) a été à l’origine de la recrudescence des phénomènes pluvieux sur le nord-ouest de l’Europe. En France, sur la période juin-juillet, la pluviométrie à l’échelle de la France a été la plus forte de ces vingt dernières années, avec des cumuls dépassant de 50 % les moyennes saisonnières.

Ces gouttes froides nous ont toutefois épargné l’été brûlant et les canicules dont a souffert une grande partie de l’Europe. Un nouveau record de chaleur européen a été établi le mercredi 11 août, avec 48,8°C observés à Syracuse, en Sicile.

Conséquence inédite de ces pluies estivales excédentaires et des faibles évapotranspirations, à fin juillet, le niveau des nappes remontait ou la vidange se trouvait ralentie dans de nombreux secteurs sauf en Méditerranée.

Qu’est-ce qu’une « goutte froide » ?C’est une poche d’air froid située dans la moyenne troposphère, entre 3000 et 7000 m d’altitude. Lorsqu'une goutte froide se positionne au-dessus d’une zone géographique, sa masse d'air froid déstabilise la masse d'air en contact avec le sol, favorisant le développement de nuages et de pluies souvent orageuses. Quand elle se déplace lentement, elle peut engendrer de fortes pluies et des inondations. Son évolution souvent aléatoire rend les prévisions météorologiques plus difficiles.

Ce phénomène a été à l’origine des fortes pluies estivales en Allemagne et en Belgique, et du temps maussade sur une partie de la France. Les conditions anticycloniques sur l’est et le nord de l’Europe ont empêché les gouttes froides de s’évacuer vers l’est de l’Europe, générant ces pluies diluviennes.

Les données en présence ne permettent pas d’associer goutte froide et changement climatique. Cependant, du fait d’une atmosphère plus chaude et d’une capacité de l’atmosphère à stocker plus de vapeur d’eau, les événements de pluies soutenues peuvent s’intensifier.

Selon le dernier rapport du Giec, l’impact du réchauffement sur les extrêmes climatiques sera important, et toutes les régions du monde seront touchées.

Zoom : le climat évolue déjà !

Que l’on quantifie l’évolution du climat annuel dans les principales villes françaises ou à l’échelle du monde, le constat est le même : le climat se réchauffe.

La classification de Köppen permet de caractériser le type de climat en fonction des régimes des précipitations et des températures. La méthodologie définit un type de climat annuel pour chaque année d’une période d’étude parmi les dix types possibles (tableau 1).

CLASSIFICATION DE KÖPPEN : neuf des dix types de climat se retrouvent désormais en France

Une étude basée sur cette classification a mis en évidence l’évolution du climat sur la France. L’impact du changement climatique a été estimé sur 36 villes françaises en comparant deux périodes de 30 ans, 1958-1987 et 1988-2017. Un calcul de fréquence pour chaque ville définit la proportion des différents types de climat annuel sur chacune des périodes (figure 2).

ÉVOLUTION DU CLIMAT : la France chauffe presque partout

La comparaison des cartes permet de dresser des évolutions entre ces deux périodes. Ainsi, sur la moitié ouest du pays, le type « Tempéré à été frais sans saison sèche » se raréfie, notamment au profit du type « Tempéré à été frais et sec », voire « Tempéré à été chaud et sec » relevant du climat méditerranéen classique. Sur le quart nord-est et en montagne, le type « Tempéré froid » évolue vers « Tempéré à été frais sans saison sèche » tandis qu’en Méditerranée, le type « Semi-aride frais » est en nette augmentation.

Les scientifiques alertent sur l’évolution du climat

Certaines conséquences du réchauffement sont déjà irréversibles à l’échelle du siècle ou du millénaire - en particulier concernant les océans, les calottes glaciaires et la montée du niveau des mers.

Le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (Giec) a publié en août 2021 la première partie de son sixième rapport, qui s’intéresse aux bases physiques du changement climatique.

Selon ses conclusions, les évolutions du climat sont sans précédent depuis deux mille ans. La hausse de la température moyenne mondiale atteint déjà 1,09°C par rapport à la période préindustrielle (1850-1900) et devrait atteindre + 1,5 °C vers 2030. D’ici la fin du siècle, le pire des scénarios prévoit un réchauffement compris entre + 3,3 et + 5,7°C.

Le rapport fait clairement le lien entre les rejets de gaz à effet de serre d’origine humaine et le réchauffement global. Sous des scénarios à fortes émissions de GES, les puits de carbone actuels (terres agricoles, forêts, océans) seront moins efficaces et peuvent même devenir des contributeurs nets au réchauffement. L’impact sur les extrêmes climatiques sera ainsi important, et toutes les régions du globe seront touchées.

Il est donc important de limiter ce réchauffement car chaque dixième de degré supplémentaire provoque une augmentation significative des extrêmes de température ainsi que de l'intensité des fortes précipitations et des sécheresses. Des réductions fortes de nos émissions aujourd’hui auront un impact fort sur l’évolution du climat au-delà de 2040.

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