Besoins en eau du maïs : l’irrigation doit s’adapter au réchauffement
En France, le maïs grain irrigué représente, en moyenne sur les cinq dernières années, 38 % des surfaces en maïs grain et 45 % de la production (source Agreste). Les effets du changement climatique sont déjà visibles sur l’évolution du climat de ces dernières décennies. Ce phénomène devrait se poursuivre avec, pour conséquences, une diminution des pluies estivales, surtout dans le sud de la France, et une légère augmentation des pluies hivernales. L’augmentation concomitante des événements de sécheresse aura une conséquence directe sur la production des maïs non irrigués et sur les besoins en eau d’irrigation des maïs irrigués.
Quelle évolution depuis 1960 ?
Anticiper le changement climatique futur nécessite de se pencher sur l’évolution climatique observée depuis que les données météo et agronomiques existent. Si l’on compare la somme des températures idéales pour le maïs (base 6-30) durant l’été (11 juin-31 août) de la période 1961-1990, considérée comme la période de référence, avec celle de la période 1991-2017 en France, on constate une augmentation générale de cette somme sur l’ensemble du territoire français.
En parallèle, si l’on considère la pluviométrie à la même période, il est plus difficile de voir se dessiner une augmentation ou une réduction des pluies. Dans les zones de production de maïs irrigué, les pluies tendent néanmoins à diminuer. L’évapotranspiration potentielle (ETP, un indicateur générique représentant les besoins en eau d’un couvert standardisé) tend à augmenter sur la période estivale sur l’est du pays et le Sud-Ouest, hors Pyrénées. Une augmentation de l’ETP alors que la pluviométrie n’augmente pas, ou tend à diminuer, indique généralement une augmentation des besoins d’irrigation des cultures.
Quel sera l’impact de ces évolutions (besoins et climat) sur la dose d’irrigation du maïs grain ? La méthode utilisée se base sur l’estimation d’une dose d’irrigation optimale calculée a posteriori à partir de la réserve utile (RU) du sol et d’un indicateur agroclimatique : le maximum du cumul de kc x ETP – P calculé entre le semis et le stade « humidité du grain 50 % » - où kc est un coefficient qui permet de convertir l’ETP en l’évapotranspiration spécifique du maïs, et P, la pluie. Cette relation a été développée grâce à des données expérimentales d’Arvalis sur l’ensemble de la France.
L’estimation a été effectuée pour quatre sites représentatifs des situations agro-pédoclimatiques rencontrées en France : à Colmar (68) pour un maïs demi-tardif semé le 15 avril dans un sol de RU de 45 mm ; à Lyon (69), pour un maïs tardif semé le 15 avril dans un sol de RU de 65 mm ; à Mont-de–Marsan (40), pour un maïs demi-tardif semé le 15 avril sur un sol de RU de 90 mm ; et enfin au Magneraud (17), pour un maïs demi-tardif semé le 5 avril dans un sol de RU de 100 mm.
Entre 1961-1990 et 1991-2017, la dose d’irrigation tend à augmenter à Lyon (+60 mm d’écart entre les deux doses médianes), au Magneraud (+20 mm), à Mont-de-Marsan (+15 mm) comme à Colmar (+15 mm).
Le phénomène d’esquive, c’est-à-dire le raccourcissement du cycle du maïs durant la période de fort stress hydrique, est constaté sur tous les sites ; ainsi, la période d’irrigation sur le site de Colmar durait en moyenne 96 jours de 1961 à 1990 (du 7 juin au 11 septembre) et seulement 88 jours en moyenne de 1991 à 2017 (du 1er juin au 28 août). Pourtant, il ne suffit pas à compenser la hausse des besoins en eau dans la plupart des sites.
Comment évoluera la demande en eau ?
Le changement climatique se poursuit et devrait avoir des conséquences à moyen et long terme sur les cycles culturaux. Les calculs suivants se basent sur le scénario RCP 4.5 du GIEC, le groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat, qui prévoit +3 °C en moyenne mondiale en 2100. Selon cette hypothèse, quel que soit le site étudié, la tendance est à un raccourcissement du cycle du maïs pour une même date de semis et une même précocité. Ainsi, dans le cas de Mont de Marsan (figure 1), sa durée a diminué de près de deux semaines, en moyenne, entre 1961-1990 et 1991-2017, et diminuerait encore de dix jours au cours des 45 prochaines années.
Concernant les doses d’irrigation nécessaires, d’après les simulations sur le climat futur, la tendance passée à l’augmentation des besoins en eau pour Lyon, Le Magneraud, Mont-de-Marsan et Colmar se poursuivra.
Les scénarios climatiques attendus, plus stressants, soulèvent par ailleurs le problème du débit d’équipement nécessaire pour couvrir les besoins d’irrigation les jours de pointe.
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