Le raisonnement des apports azotés sur maïs change-t-il en 2022 ?
Perspectives Agricoles : Comment adapter la quantité d’azote à la situation actuelle ?
Grégory Véricel : Le ratio « prix de vente du maïs (en €/t) / prix de l’azote (en €/100 kg) » est un indicateur simple à calculer et assez fiable pour juger rapidement de l’intérêt ou non de réduire la dose d’azote. Pour le maïs, si le ratio dépasse 1,5, les optima technique et technico-économique sont confondus. En dessous de cette valeur, il devient plus avantageux, pour maximiser la marge, d’apporter une dose d’azote légèrement inférieure à la dose prévisionnelle. La perte de produit brut générée par des rendements légèrement inférieurs au potentiel (de l’ordre de 1 à 2,5 q/ha) est alors compensée par la réduction des charges de fertilisation. Par exemple, pour un prix d’achat de l’azote à 2,2 €/kg et un prix du maïs négocié autour de 200 €/t, il faudrait réduire la fertilisation azotée d’environ 30 kg N/ha par rapport à l’optimum technique, le ratio ayant pour valeur 0,9 dans ce cas(1). Il peut s’avérer judicieux de contractualiser une partie de la récolte 2022 afin de sécuriser le prix de vente et la valeur du ratio.
P. A. : Quelles mesures mettre en œuvre pour optimiser les apports ?
G. V. : Les recommandations habituelles restent bien entendu valables. La prise en compte du reliquat azoté avant le semis améliore la précision des doses estimées avec la méthode du bilan prévisionnel. Si le reliquat est important, se pose alors la question de l’intérêt des apports précoces. La bonne valorisation de l’azote passe par l’enfouissement des apports et leur fractionnement, le choix de formes d’azote moins émissives d’ammoniac, comme l’ammonitrate ou les urées additivées d’inhibiteur d’uréase, en particulier si les conditions d’apport favorables ne peuvent être garanties. Les apports en conditions sèches, venteuses et par temps chaud sont à proscrire. L’idéal est de les positionner juste avant une pluie d’au moins quinze millimètres ou un tour d’irrigation.
P. A. : À moyen terme, peut-on réduire la dépendance à l’azote minéral ?
G. V. : Pour la campagne 2023, il est probable que la hausse du prix des engrais azotés et les difficultés d’approvisionnement se poursuivent, voire s’accentuent. Dans ce contexte très incertain, il apparait prudent de mobiliser différents leviers afin de réduire la dépendance à l’azote minéral. Le recours à des sources alternatives d’azote peut ainsi être envisagé. On peut citer les engrais de ferme et les autres produits organiques, tels que les digestats de méthanisation. Ces produits peuvent compenser une partie de l’azote minéral à condition de les utiliser à bon escient. Les couverts végétaux à base de légumineuses ont également un rôle à jouer, y compris dans les situations où aucune contrainte réglementaire ne s’applique. D’autre part, après des impasses fréquentes en 2021 sur la fumure de fond, il ne faudra pas négliger les apports de P et K sur les parcelles les plus carencées afin de préserver leur fertilité. Plus généralement, la résilience des productions vis-à-vis de l’azote, amène à se poser la question de la diversification des assolements et du choix des rotations, par exemple en introduisant plus de protéagineux, en cultures intermédiaires ou de vente, avant des cultures exigeantes en azote. Une approche technico-économique est ainsi nécessaire.
(1) La matrice de calcul (écart de dose d’azote entre l’optimum technique et l’optimum technico-économique en fonction du prix du maïs et de l’azote) est disponible sur http://arvalis.info/2cd.
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