Facteurs agroclimatiques de risque : comment limiter les contaminations au champ
À la floraison du maïs, beaucoup de soleil et l’absence de pluies favorisent les contaminations par les Aspergillus qui colonisent la plante par ses soies.
Le réchauffement climatique est, hélas, favorable au développement des espèces d’Aspergillus produisant des aflatoxines en maïs grain. S’il n’est guère possible de contrôler le climat, certaines pratiques culturales peuvent modifier le risque de contaminations. Tour d’horizon des facteurs qui influencent le développement de ce champignon toxinogène.
Le climat, premier facteur de risque
L’émergence des aflatoxines en Europe est en lien direct avec les modifications mondiales de la température et de l’humidité. Ainsi, des travaux récents conduits par des chercheurs italiens ont démontré qu’un réchauffement climatique de
C’est pourquoi, dès 2015, un réseau national de plus de mille parcelles d’agriculteurs animé par Arvalis et couvrant l’ensemble des bassins de production du maïs grain a permis d’étudier les niveaux de contamination de cette culture par les champignons aflatoxinogènes Aspergillus
L’ensemble de ces éléments a permis à Arvalis d’établir une première identification des déterminants agroclimatiques influant l’émergence de ces deux espèces de champignons et du risque «
ARROW-CIRCLE-RIGHT Au printemps, des températures et un rayonnement élevés seront favorables aux contaminations ultérieures. Elles pourraient rendre les Aspergillus plus compétitifs dans l’environnement et ainsi leur donner de meilleures chances de se développer.
- En juillet, à la floraison du maïs, un rayonnement élevé ainsi que l’absence de pluies autour de la floraison sont favorables aux contaminations : ces conditions permettent au champignon de coloniser le maïs par ses soies.
- Après la floraison, toutefois, un rayonnement et des températures élevés tout comme l’absence de pluie ne sont plus des conditions favorisantes. Car si le champignon a contaminé le maïs à la floraison, il progresse désormais dans la plante à l’abri des conditions climatiques. Des attaques tardives sont, en revanche, possibles sur des maïs stressés ou dont les grains ont été blessés par la grêle ou des insectes foreurs. L’étude de l’impact du climat sur cette période est donc plus complexe.
Des pratiques impactantes
- L’irrigation. C’est un enjeu déterminant dans les contaminations car, outre le climat, le premier facteur significatif dans les contaminations en Aspergillus est le stress hydrique. L’absence de pluie et/ou d’irrigation a un double impact. Sur la plante, car le manque d’eau l’affaiblit, la rendant plus vulnérable aux attaques d’insectes foreurs ou de pathogènes, dont les Aspergillus. Sur le complexe fongique présent dans le sol, car l’absence de pluie ou d’irrigation et l’aridité du sol rendent les Aspergillus plus compétitifs que les autres espèces fongiques : ces conditions favorisent leur développement (encadré) et, par conséquent, le risque de contaminations à la floraison.
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La gestion des résidus de culture. Broyer les cannes et enfouir les résidus est indispensable pour gérer les insectes foreurs et limiter l’inoculum d’Aspergillus. Les insectes foreurs augmentent le risque de contaminations tardives par Aspergillus mais aussi par les Fusarium dans le maïs en culture. Les dommages causés par ces insectes sur les épis créent, en effet, des voies d’entrée pour le champignon qui favorisent sa propagation.
La protection des parcelles vis-à-vis des larves de lépidoptères doit donc être envisagée dans les situations à risque. Le broyage des cannes tôt après la récolte constitue une mesure de prophylaxie indispensable
Comme pour les Fusarium, le stade saprophyte d’Aspergillus se déroule dans le sol, notamment sur les résidus de culture qui constituent donc le potentiel infectieux de la parcelle. La gestion des résidus décrite précédemment et leur enfouissement facilitent la décomposition de la matière organique et ainsi réduisent le potentiel infectieux de la parcelle. - Les dates de semis et de récolte. Les récoltes tardives sont à proscrire
Les Aspergillus de la section Flavi passent l’hiver sous forme de mycélium ou de sclérotes dans les résidus végétaux. Ils démarrent leur cycle de reproduction au printemps. Ces espèces préfèrent la chaleur et les conditions sèches
L’infection du maïs a lieu essentiellement à la floraison par les soies, ou après la floraison via des blessures sur la plante qui constituent autant de portes d’entrée pour le champignon.
La production d’aflatoxines dans les grains de maïs n’a lieu que si l’humidité du grain est inférieure à 32
Attention au cumul des facteurs
La gestion du risque aflatoxines est multifactorielle. Elle peut s’appuyer sur divers leviers d’atténuation en interaction avec le climat. L’étude d’Arvalis a considéré l’effet des deux principaux facteurs agronomiques d’intérêt, la gestion des résidus de culture et l’irrigation, et de deux facteurs climatiques aggravants, les températures au mois d’avril et la pluie à la floraison (figure
La proportion de parcelles significativement contaminées par A.
En cas de risque climatique peu important, l’effet des pratiques agronomiques n’est pas visible car le champignon s’exprime peu, voire pas du tout. En revanche, en cas de risque climatique élevé, l’effet cumulatif d’une bonne gestion des résidus de culture et de l’absence de stress hydrique grâce à l’irrigation permet de diminuer par trois la proportion de parcelles significativement contaminées
Ces travaux doivent être poursuivis pour intégrer de nouveaux scénarios climatiques et mieux comprendre l’émergence des aflatoxines sur notre territoire. Car l’agriculture est contrainte de s’adapter au changement climatique, celui-ci faisant évoluer la nature des pathogènes et, par suite, l’efficacité de certaines méthodes de lutte contre les mycotoxines utilisées aujourd’hui.
Il apparaît déjà que certaines pratiques ciblant les aflatoxines peuvent entrer en conflit avec d’autres adaptations au changement climatique. Ainsi l'irrigation est défavorable à Aspergillus mais peut être restreinte, voire impossible, certaines années. Chaque adaptation des pratiques nécessite donc de peser tous les «
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